Argumentaire

Le présent colloque se veut offrir un terrain et un cadre de réflexion sur la musique modale – plus largement sur la modalité – à la fin du XIXe siècle et au début du XXsiècle en France, tout en s’interrogeant sur les diverses influences qui ont enrichi les langages musicaux de cette époque, telles que l’antiquité gréco-romaine, le plain-chant, les différentes traditions orales, le jazz, la musique de l’Asie ou encore les musiques dites « folkloriques ». La modalité, souvent associée avec la musique d’antan ou bien de l’orient, se trouve par conséquent juxtaposée à la tonalité de la musique savante occidentale. Or, cette dichotomie néglige l’impact de l’échange culturel sur le développement musical des hautes sphères de l’art européen, bien présent tout au long de la période dite « classique » et qui s’épanouit au cours des dernières décennies du XIXe siècle. En outre, une telle répartition présume que la tonalité se distingue fondamentalement de la modalité plutôt que d’en représenter une manifestation particulière. Admettant que, pour plusieurs raisons, il est néanmoins pratique de distinguer entre modalité et tonalité, le présent colloque invite à interroger l’influence de la première sur cette dernière. Les langages musicaux depuis la fin du XIXe siècle se renouvellent et trouvent, dans la modalité, une forme de « souplesse singulière » qui autorise « une extrême richesse de moyens » (Kœchlin / Duchesneau 2006). L’écriture modale ayant un « caractère moins directionnel » (Caron 2002), moins anticipable, elle offre un terrain fertile pour les compositeurs. Fertile s’il en est, car les compositeurs s’approprient la modalité de biens des manières, la confrontent ou l’unissent au langage tonal (voire atonal) et la font sans cesse évoluer. La modalité s’apparente à une « construction dont les caractéristiques précises et les fondements théoriques changent constamment » (Leβmann 2019). Si les études sur l’analyse et la théorie de la modalité dans les musiques de tradition orale ou dans la musique ancienne sont nombreuses (par exemple, Bourgault-Ducoudray 1885, Duhamel 1910, Emmanuel 1913 et 1928, Labussière 2008), celles sur son usage dans la musique française de la Troisième République notamment (mais non exclusivement) le sont moins (Gonnard 2000, Corbier 2010, Douche 2012, etc.). En ouvrant un espace de discussion, le présent colloque souhaite être le lieu d’une réflexion sur les théories de la modalité ainsi que sur les méthodes et approches analytiques pour étudier la modalité dans la musique française à l’orée du XXsiècle.

Personnes connectées : 4 Vie privée
Chargement...